Du Soi au Tao : rencontre entre psychologie jungienne et médecine traditionnelle chinoise à Avignon - Le Pontet

Photo de Marc Denozi psychotérapeute acupuncteur médecine chinoise
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Marc DENOZI Médecine traditionnelle Chinoise et psychologie Jungienne

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Médecine Chinoise & Psychologie Jungienne près d'Avignon

Découvrez comment la médecine chinoise et la psychologie jungienne, incluant l'analyse des rêves et le travail symbolique, favorisent une transformation en profondeur près d'Avignon. Explorez les énergies des méridiens pour un meilleur équilibre.

PSYCHOLOGIE ET TRAVAIL DES RÊVESENERGÉTIQUE TRADITIONNELLE CHINOISE

Marc François DENOZI

11/19/20258 min read

Introduction – Relier Jung et la Médecine Traditionnelle Chinoise

Jung, à la différence de Freud, ne réduit pas la spiritualité à une illusion infantile. Il y voit une dimension structurante de l’être humain, capable « des plus hautes réalisations comme des plus sombres pathologies ». Cette dimension se manifeste à travers des foyers d’énergie psychique qu’il nomme archétypes : des matrices vivantes d’images et d’affects qui orientent nos pulsions, nos choix et notre destinée intérieure.

Ces archétypes s’expriment par des images puissantes, chargées d’émotion, qui prennent souvent une coloration sacrée. Ils se donnent à voir dans les grands mythes, les religions, les contes, mais aussi dans l’expérience intime : les rêves, les fantasmes, les synchronicités qui jalonnent nos vies. De ce point de vue, Jung reste un clinicien : sa philosophie naît d’abord du travail avec ses patients et de sa propre traversée intérieure, notamment la crise profonde qui l’a conduit à explorer son inconscient dans ce qu’il appellera plus tard le Livre rouge.

Dans cette perspective, la psychanalyse jungienne et la Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC) se rejoignent étonnamment. Toutes deux considèrent que l’être humain est traversé par des forces invisibles, à la fois psychiques et énergétiques ; toutes deux affirment que la maladie, la crise, le symptôme sont aussi des messages, des tentatives de rééquilibrage ou de transformation. Là où Jung parle d’archétypes et de Soi, la MTC parlera de Qi, de Shen, des benshen (les esprits des organes), du jeu du Yin-Yang et des Cinq Mouvements.

Archétypes et benshen : deux langages pour une même réalité vivante

Pour Jung, l’archétype n’est pas une simple idée culturelle. C’est une source énergétique intemporelle, « inconnaissable en soi », qui ne devient percevable qu’à travers ses images : figures divines, symboles, rêves, visions. Il distingue ainsi l’archétype-en-soi (le noyau énergético-spirituel) de l’image archétypique (la forme que ce noyau prend pour une conscience donnée, dans une culture donnée).

La MTC procède de façon très similaire lorsqu’elle parle des benshen, les « esprits des organes ». Le Hun (Foie), le Po (Poumon), le Shen (Cœur), le Yi (Rate) et le Zhi (Rein) sont autant de polarités psychiques et spirituelles enracinées dans le corps. Ils ne sont pas de simples « fonctions psychologiques » : ce sont des foyers d’intention, de mémoire, de désir, de courage, de joie ou de tristesse, qui orientent notre vie tout entière.

On peut alors établir un pont naturel :

  • Les archétypes jungiens sont comme de grandes matrices collectives, analogues au « ciel antérieur » de la tradition chinoise, ce réservoir d’images et de forces qui précède nos formes individuelles.

  • Les benshen de la MTC seraient les relais organiques, incarnés, de ces forces dans le corps : chaque organe-méridien devient le théâtre d’un certain type d’archétype (maternité, justice, combat, douceur, etc.).

  • Le Soi jungien, centre régulateur de la psyché, qui cherche à unir conscient et inconscient, évoque le Tao : ce principe unifiant qui harmonise le Yin et le Yang et ordonne la circulation du Qi dans les méridiens.

Ainsi, lorsque Jung affirme : « La psyché est en nous, mais elle est aussi tout autour de nous », la MTC pourrait répondre : « Le Qi circule dans les méridiens, mais il tisse aussi le lien entre l’homme, le Ciel et la Terre ». Les deux langages désignent un champ vivant, commun, où corps, âme et esprit ne sont jamais séparés.

Un rêve d’Ishtar : quand l’archétype parle… et que le corps suit

Imaginons maintenant un patient de cinquante ans, écrivain, issu de la Méditerranée orientale. Il traverse une panne créative, angoissé par un délai éditorial qui approche. Ses rêves ordinaires tournent autour de scènes quotidiennes, jusqu’à ce qu’une nuit surgisse une image radicalement différente :

Il se trouve dans un dédale souterrain, rempli de colonnes brisées qui évoquent Babylone. Le nom « Ishtar » s’impose à lui. Une statue turquoise, allongée au sol, s’anime. Il fait partie d’un groupe d’explorateurs à la Indiana Jones, amusés, presque désinvoltes. Mais lui répète sans cesse : « Il ne faut pas réveiller la déesse. Je la connais. Elle va être furieuse et nous anéantir ». Plus tard, il voit un homme au visage calciné et craint qu’Ishtar ne lui ait infligé ce sort. Enfin, dans un immeuble de sa ville natale, il arrive au dernier étage ; une porte s’ouvre et une silhouette androgyne au visage couvert de céruse apparaît. La terreur est absolue.

Au réveil, cet homme me demande : « Mais qu’est-ce que c’est, Ishtar ? Et qu’est-ce que je lui ai fait ? Ce rêve ne veut rien dire ». Intellectuellement, il se souvient vaguement d’une « déesse de la fertilité », mais ce savoir ne suffit pas à apaiser l’angoisse viscérale.

Pour Jung, un tel rêve n’est pas seulement une production personnelle : il manifeste la mise en jeu d’un archétype du Féminin sacré, sous la forme d’Ishtar – déesse mésopotamienne de l’amour, de la sexualité, de la guerre et de la souveraineté. Elle est à la fois Vénus étoile du matin et lionne de combat, amante ardente et force destructrice de l’orgueil.

Dans la perspective jungienne, ce rêve signale que l’inconscient ne supporte plus que cette énergie féminine soit traitée comme un décor exotique (l’expédition « qui s’amuse »), alors qu’elle réclame respect, écoute et transformation intérieure. « Il ne faut pas réveiller la déesse » : c’est exactement ce que fait notre culture lorsqu’elle refoule le féminin sacré, l’éros, la sensibilité, au profit d’un rationalisme desséché ou d’une action sans âme.

Comment la MTC lit-elle un tel rêve ?

Si nous changeons de regard et que nous abordons le même rêve avec les outils de la Médecine Traditionnelle Chinoise, un autre plan se dévoile sans contredire le premier.

  • Ishtar, déesse de feu, d’amour et de guerre, évoque un Feu du Cœur intense, lié au Shen : exaltation, passion, mais aussi risque de brûlure psychique, d’insomnie, d’angoisses, de palpitations, de bouche sèche, de rougeurs. Le visage « calciné » d’un homme dans le rêve peut symboliser autant une atteinte de l’image de soi qu’un Feu pathologique qui « monte à la tête ».

  • Le décor babylonien souterrain, les colonnes brisées, parlent d’un Vide et d’une instabilité de la Rate et du Rein : racines fragilisées, mémoire profonde troublée, difficulté à porter le poids de l’héritage familial et culturel.

  • La panique de perdre le fils, puis de le chercher dans un petit immeuble, renvoie à la relation entre Foie (Gan) et Cœur (Xin) : le Foie abrite le Hun, l’âme éthérée, liée aux projets, aux visions, à la créativité ; le Cœur gouverne le Shen, la clarté de conscience. Quand le Hun est captif ou en errance, la créativité se fige, la personne tourne en rond, l’inspiration « disparaît dans l’immeuble ».

Dans ce type de rêve, la MTC reconnaît une stagnation du Qi du Foie, un excès de Feu ou de Yang au niveau du Cœur, une impossibilité pour le sang (Xue) de nourrir sereinement l’esprit. Le corps peut alors manifester : tensions musculaires, migraines, troubles du sommeil, gênes digestives, oppression thoracique… Parallèlement, l’archétype du Féminin (Ishtar) vient exiger une réorientation profonde du style de vie, du rapport au désir, à la création, au temps de repos.

Jung dirait : un archétype est constellé.
La MTC dirait : un mouvement énergétique est déséquilibré et cherche à se transformer.
Dans ma pratique, ces deux formulations se complètent.

De l’archétype au méridien : une clinique intégrative

Ce que Jung découvre dans sa propre traversée – et qu’il résume par la phrase célèbre « je ne crois pas, je sais » – rejoint de très près la voie chinoise : le véritable savoir n’est pas une croyance abstraite, mais une expérience vécue du lien entre visible et invisible. Il insiste sur le fait que l’exploration de l’inconscient est une « voie initiatique antique et intemporelle », où rien ne disparaît, tout se transforme.

De son côté, la tradition médicale chinoise affirme dans le Huangdi Neijing que « l’homme est le reflet du Ciel et de la Terre » et que la maladie est souvent le signe d’un désaccord profond entre notre conduite, notre environnement et l’ordre vivant du Tao.

Faire dialoguer Jung et la MTC, c’est donc :

  • Écouter le rêve comme message du Soi et, en même temps, comme indication d’un déséquilibre énergétique précis (méridiens, organes, émotions associées).

  • Comprendre que l’archétype se dépose dans le corps : une Ishtar ignorée peut se traduire autant par un sentiment de vide amoureux ou d’effondrement créatif que par des troubles du sommeil, des douleurs thoraciques, un état d’épuisement brûlé.

  • Proposer un chemin où l’analyse symbolique (jungienne) et le rééquilibrage des méridiens (MTC) ne s’opposent pas mais se renforcent : le travail énergétique apaise le système nerveux, régularise le Qi, permet au corps de supporter la montée des images archétypiques ; en retour, le travail sur les rêves, les mythes et le transfert donne un sens aux symptômes, oriente les changements de vie et prévient le retour des mêmes déséquilibres.

Dans cette approche, la consultation devient à la fois laboratoire symbolique et espace thérapeutique énergétique. L’aiguille sur un point du Cœur, du Foie ou du Rein, le travail manuel sur un méridien, le conseil de rythme ou d’alimentation ne sont jamais « techniques » au sens réducteur du terme : ils s’inscrivent dans un dialogue avec ce que Jung appelait « l’image de Dieu en nous », et que la MTC désigne comme l’harmonie entre Shen, Qi et Jing.

Une voie initiatique contemporaine

En distinguant clairement l’archétype-en-soi de ses images, Jung cherchait à désamorcer les prétentions absolues : « Croire détenir la vérité ultime, écrivait-il, est une forme d’inflation psychique ». De même, la MTC, dans sa profondeur taoïste, se garde de tout dogmatisme : le Tao ne se laisse pas enfermer dans des formules.

Pourtant, leur message converge vers une invitation commune :

  • Reconnaître que notre vie est traversée par des forces plus vastes que notre ego.

  • Apprendre à lire les crises (symptômes, rêves, blocages créatifs, maladies fonctionnelles) comme des signaux d’appel du Soi/Tao.

  • Entrer dans un travail où le corps, le psychisme et la dimension spirituelle sont honorés ensemble, sans hiérarchie et sans confusion.

Dans ma pratique, le lien entre Jung et la MTC me permet ainsi de proposer un accompagnement qui ne sépare pas le sens et le corps, le mythe et le méridien, l’archétype et le Qi. Les rêves deviennent des cartes, les méridiens des chemins, et la rencontre thérapeutique un lieu où chacun peut, progressivement, retrouver sa propre voie de métamorphose et de renouveau.

Références (sélection)

  • C. G. Jung, Psychologie et religion, Paris, Buchet/Chastel.

  • C. G. Jung, Réponse à Job, Paris, Buchet/Chastel.

  • C. G. Jung, Aion. Études sur le symbole du Soi, Paris, Albin Michel.

  • C. G. Jung, Le Livre rouge, Paris, L’Iconoclaste.

  • C. G. Jung, Correspondance, vol. 1–3, Paris, Albin Michel.

  • Michel Cazenave (dir.), La face féminine de Dieu, Paris, Albin Michel.

  • Huangdi Neijing Suwen, classiques de médecine chinoise (traductions françaises diverses).

  • Elisabeth Rochat de la Vallée, Les esprits des organes, Paris, Guy Trédaniel.

  • Claude Larre & Elisabeth Rochat de la Vallée, Les mouvements de l’âme selon la tradition médicale chinoise, Paris, Desclée de Brouwer.